Quel point de départ pour l’action en responsabilité du souscripteur ayant subi des pertes sur son contrat d’assurance vie ?

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Notons dès à présent que l’arrêt commenté, ne donne aucune indication sur la responsabilité engagée ou non du professionnel conseil. La chambre commerciale de la Cour de cassation était ici interrogée sur le seul caractère prescrit ou non de l’action en responsabilité engagée par les souscripteurs d’un contrat d’assurance vie en perte.

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Précisément, à la suite de la cession de leur résidence principale, M. et Mme H. alors âgés de 84 et 87 ans, avaient sur conseil du cabinet F., souscrit un contrat d’assurance vie le 1er février 2011, pour placer une partie du prix de cession (350.000€). Une partie des capitaux (120.000€) avait alors été placée une unité de compte dénommée « Expresso Rendement 10,70% », fonds composé d’actions.

Il était par ailleurs prévu un terme au contrat le 15 février 2015.  A l’échéance du contrat, les souscripteurs ne récupérèrent que 39 891,05 € en raison d’importantes pertes subies au cours de la vie du contrat.

Au regard de ce qu’ils estimaient être un préjudice, les souscripteurs assignèrent en responsabilité aussi bien le cabinet F que la compagnie d’assurance et le courtier en assurance commercialisateur du contrat. Le décès des époux requérants étant intervenu en cours d’instance, nous préciserons que l’action a été reprise par les héritiers de ces derniers. Le litige s’est alors articulé sur la question de savoir si l’action diligentée était prescrite ou non.

Le cabinet F. versait alors aux débats une annexe signée par les requérants lors de la souscription du contrat qui mentionnait le risque de fluctuation et donc de perte en capital des supports sur lesquels ils avaient investi. Ainsi, il estimait qu’en signant ce document le risque de perte avait été porté à la connaissance des clients. Les investisseurs ayant appris que le contrat présentait un risque de perte à la signature du contrat, les juges de la Cour d’appel de Rouen (CA Rouen, 5 janv. 2023, n°21/03898) en déduisaient que le point de départ du délai de prescription de l’action en responsabilité devait être fixé à cette date soit le 1er février 2011.

M. et Mme H. faisaient alors grief à l’arrêt de déclarer leur action prescrite, estimant que le délai de prescription courait à compter du jour ou le dommage s’était réalisé ou avait été révélé aux victimes. Saisie sur pourvoi de ces derniers, il appartenait à la Chambre commerciale de la Cour de cassation de statuer (Cass. com., 23 oct. 2024, n°23-13.103).

S’appuyant une lecture combinée des articles 2224 du Code civil et L. 110-4 du Code de commerce, la Haute juridiction rappela que le délai de prescription quinquennal des obligations entre commerçants et non-commerçants courait à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. 

Ensuite, le « manquement d’un intermédiaire à une opération d’investissement à son obligation d’informer le souscripteur d’un contrat d’assurance-vie libellé en unités de compte sur le risque de pertes présenté par un support d’investissement, ou à son obligation de le conseiller au regard d’un tel risque, prive ce souscripteur d’une chance d’éviter la réalisation de ces pertes. » Dans cette circonstance, le délai de prescription de l’action en indemnisation commence à courir à la date du rachat du contrat d’assurance-vie.

Au regard de l’espèce, la Cour de cassation cassa l’arrêt d’appel. Le dommage invoqué, tenant aux pertes subies sur les sommes investies, ne s’étant pas réalisé à la date de la signature du contrat, le délai de prescription ne pouvait avoir commencé à courir à cette date.

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Communication AUREP

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