Les plus-values réalisées lors de la cession, à titre onéreux, de valeurs mobilières et de droits sociaux par les personnes physiques dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé relèvent du régime des plus-values mobilières des particuliers (CGI, art. 150-0 A). Les gains sont soumis au prélèvement forfaitaire unique de 12,8 % ou sur option, au barème progressif de l’IR (CGI, art. 200 A-2), ainsi qu’aux prélèvements sociaux (17,2 %).

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Les gains nets réalisés du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2031 par les dirigeants de PME qui cèdent les titres de leur société à l’occasion de leur départ à la retraite sont, quelles que soient les modalités d’imposition (PFU ou barème progressif), réduites sous certaines conditions d’un abattement fixe de 500 000 € (CGI, art. 150-0 D ter). Le dispositif applicable jusqu’au 31 décembre 2024 a été prorogé et le montant de l’abattement porté à 600 000 € pour les cessions réalisées au profit de jeunes agriculteurs selon les critères définis par le Code rural et de la pêche maritime (L. de finances n° 2025-127, 14 février 2025, art. 70 et 92). Les prélèvements sociaux restent dus sur la plus-value avant tout abattement.
L’administration a récemment précisé l’articulation des abattements fixe et proportionnel lorsque les membres d’un même foyer fiscal cèdent les titres d’une société qu’ils détiennent (BOFiP-RES-RPPM-000135, 14 novembre 2024).
Elle tire également les conséquences de l’allongement de 62 à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite introduit par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, pour les dirigeants qui ont cédés leurs titres avant la réforme (L. n° 2023-270, 14 avril 2023 ; Rép. Gatel, JO Sénat 28 septembre 2023, n° 6476).
I – Rappel succinct des conditions d’application de l’abattement fixe (CGI, art. 150-0 D ter)
Conditions d’application relatives à la société (BOFiP-RPPM-PVBMI-20-40-10-20, 20 décembre 2019). La société doit :
– être une PME au sens européen à la date de clôture des 2 derniers exercices précédant la date de la cession (au sens européen, une moyenne entreprise a moins de 250 salariés et un CA annuel ≤ 50 M€ ou un total du bilan annuel ≤ 43 M€) ;
– avoir exercé, de manière continue au cours des 5 années précédant la cession, une activité opérationnelle (industrielle, commerciale, artisanale, libérale, agricole ou financière) ou avoir pour objet social exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant les activités citées (société holding animatrice de son groupe). Les activités de gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier sont exclues ;
– avoir son siège de direction effective en France ou dans un autre Etat de l’EEE ;
– être passible de l’IS (ou à impôt équivalent) de plein droit ou sur option.
Conditions d’application relatives aux titres cédés (BOFiP-RPPM-PVBMI-20-40-10-30, 5 juillet 2022). Les titres cédés doivent avoir été détenus depuis au moins 1 an à la date de la cession. La cession doit porter sur l’intégralité des titres détenus par le cédant dans la société ou lorsque celui-ci détient plus de 50 % des droits de vote, sur plus de 50 % de ces droits ou, dans le cas où seul l’usufruit est détenu, sur plus de 50 % des droits dans les bénéfices sociaux.
Conditions d’application relatives au cédant (BOFiP-RPPM-PVBMI-20-40-10-40, 14 novembre 2024). Le cédant doit de manière continue pendant les 5 années précédant la cession :
– avoir été dirigeant de la société dont les titres ou droits sont cédés (gérant de SARL ou de SCA ; associé en nom d’une société de personnes soumise à l’IS ; président, directeur général, directeur général délégué, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d’une SA ou d’une SAS) ;
– avoir détenu au moins 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société cédée soit directement, soit indirectement par l’intermédiaire d’une société interposée dont les bénéfices sont imposés entre les mains des associés, ou d’un membre de son cercle familial (conjoint, partenaire de pacte civil de solidarité, leurs ascendants, leurs descendants et leurs frères et sœurs).
Le cédant doit cesser toute fonction de direction ou salariée dans la société et faire valoir ses droits à la retraite dans les 2 années suivant ou précédant la cession. Ce délai a été porté à 3 ans lorsque le cédant a fait valoir ses droits à la retraite entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2021 et que ce départ à la retraite a précédé la cession (L. n° 2021-1900, 30 décembre 2021, art. 19, II et III).
II – Articulation des différents dispositifs d’abattement
Non-cumul des dispositifs d’abattement pour une même cession. L’abattement fixe est pratiqué sur le gain net. Il s’applique à l’ensemble des gains afférents à une même société, non par cession. Ainsi, en cas de cessions échelonnées, même au cours d’années différentes, le cédant ne bénéficie que d’un abattement de 500 000 € pour l’ensemble des cessions réalisées (BOFiP-RPPM-PVBMI-20-40-20, n° 50, 5 juillet 2022 et 20-40-10-30, n° 30 et suivants, 5 juillet 2022 sur les conditions de prise en compte des cessions échelonnées). Mais, en cas de cessions de titres de plusieurs sociétés, l’abattement fixe s’applique par société cible (Rép. Cadic, JO Sénat 1er septembre 2016, n° 14869).
L’abattement proportionnel applicable, en cas d’option pour le barème progressif, aux plus-values de cession de titres souscrits ou acquis avant le 1er janvier 2018, ne s’applique pas au reliquat du gain net imposable après application de l’abattement fixe (CGI, art. 150-0 D-1, dernier alinéa). Le cédant doit donc faire un choix lorsqu’il remplit les conditions d’application des deux dispositifs, entre l’abattement fixe et l’abattement proportionnel de droit commun (CGI, art. 150-0 D 1 ter) ou renforcé (CGI, art. 150-0 D 1 quater). Cependant lorsque le dirigeant vend en une seule fois, plus de 50 % des droits de vote sans céder l’intégralité de sa participation, la règle du non-cumul ne s’applique qu’au gain afférent à cette cession (elle s’applique alors à l’intégralité de ce gain, y compris sa fraction excédant le cas échéant 500 000 €). Le gain réalisé lors de l’éventuelle cession ultérieure du reste de la participation bénéficie, le cas échéant, de l’abattement proportionnel (BOFiP-RPPM-PVBMI-20-40-20, n° 110 et 130, 5 juillet 2022).
Cumul des dispositifs d’abattement au sein du foyer fiscal. La question posée était la suivante : « L’imposition commune à l’impôt sur le revenu fait elle obstacle à la détermination individualisée de la plus-value réalisée par chacun des deux membres du foyer fiscal à l’occasion de la cession de titres d’une même société lorsque l’un peut bénéficier de l’abattement fixe de 500 000 € pour départ à la retraite prévu par l’article 150-0 D ter du CGI et l’autre de l’abattement pour durée de détention prévu par l’article 150-0 D du CGI ? ».
L’hypothèse concerne plus particulièrement les époux ou partenaires d’un pacte civil de solidarité soumis à une imposition commune, associés d’une même société, réalisant chacun une plus-value lors de la cession des titres de cette société.
Dans cette situation, l’administration affirme la possibilité pour les membres d’un même foyer fiscal de bénéficier de dispositifs d’abattement distincts. Les conditions relatives au cédant pour bénéficier de l’abattement fixe s’apprécient, dans le cas d’un couple marié ou de partenaires liés par un pacte civil de solidarité, au niveau de chaque conjoint pris isolément à l’exception de celle tenant au seuil de détention des parts de 25 % (CE 10 décembre 2014, n° 371437 ; BOFiP-RPPM-PVBMI-20-40-10-40, n° 10, 14 novembre 2024). Les conditions d’application de l’abattement proportionnel sont appréciées de la même manière (BOFiP-RES-RPPM-000135, 14 novembre 2024). Aussi, toutes conditions d’application étant par ailleurs remplies, lorsque chacun des deux membres d’un foyer fiscal cède ses propres titres de société :
– Chaque cédant peut bénéficier de l’abattement fixe. Un couple marié ou pacsé pourrait donc bénéficier d’un abattement cumulé de 1 000 000 € sur l’ensemble de ses gains de cession mais sans que le reliquat d’abattement non utilisé par l’un puisse être reporté et imputé sur la plus-value réalisée par l’autre ;
– En cas d’option pour le barème progressif de l’IR, le fait que l’un bénéficie de l’abattement pour départ à la retraite sur la plus-value qu’il réalise, ne prive pas l’autre de l’abattement proportionnel sur la plus-value réalisée lors de la cession de ses propres titres. Cette solution sera retenue lorsque les conditions d’application de l’abattement fixe ne sont pas réunies par l’un des cédants ou lorsque l’abattement proportionnel se révèle plus favorable que l’abattement fixe ; en effet, chaque cédant est aussi susceptible de bénéficier d’un abattement proportionnel (de droit commun ou renforcé) qui peut permettre de réaliser une économie d’impôt plus importante qu’avec l’application de l’abattement fixe. Mais attention, l’option pour l’application du barème progressif de l’IR est irrévocable et globale : elle s’applique à tous les gains de cessions et revenus mobiliers du contribuable.
III – Conséquences de l’allongement de l’âge de départ à la retraite
L’âge légal de départ à la retraite a été allongé par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 (L. n° 2023-270, 14 avril 2023). L’administration a précisé les modalités d’application de l’abattement fixe à la suite de cette réforme (Rép. Gatel, JO Sénat 28 septembre 2023, n° 6476 ; BOFiP-RPPM-PVBMI-20-40-10-40, n° 405, 14 novembre 2024).
En effet, pour bénéficier de l’abattement fixe, le cédant doit cesser toute fonction de direction ou salariée dans la société dont il cède les titres, et faire valoir ses droits à la retraite dans les 2 années suivant ou précédant la cession. Or, l’allongement de l’âge de départ à la retraite peut priver du bénéfice de l’abattement fixe certains dirigeants qui anticipaient un départ en retraite dans les 2 ans de la cession des titres de leur société ou les contraindre à partir à la retraite dans des conditions dégradées pour respecter ce délai. C’est pourquoi « le bénéfice de l’abattement prévu par ces dispositions ne sera pas remis en cause à l’égard des dirigeants ayant déjà cédé les titres de leur entreprise à la date de promulgation de la loi n° 2023-270 du 14 avril 2023, qui, dans le délai de deux ans suivant cette cession auraient atteint l’âge légal de départ en retraite applicable antérieurement à cette réforme et qui seront effectivement partis en retraite à l’âge légal relevé par cette même réforme ».
Les dirigeants ayant cédé leurs titres avant le 14 avril 2023, date de promulgation de la loi reportant l’âge légal de départ à la retraite, qui font valoir leurs droits à la retraite à l’âge légal bénéficient de l’abattement fixe s’ils ont atteint, dans le délai de 2 ans, l’âge légal de départ à la retraite applicable avant la réforme.