Cet arrêt (Cass., Civ. 1ère, 17 mai 2023, n°21-17.290) vient rappeler ô combien le devoir de conseil et d’information du notaire revêt une importance majeure, particulièrement en matière fiscale.
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Dans ce litige, la défunte avait fait donation à ses trois enfants de la nue-propriété des parts sociales d’un groupement forestier. Le notaire chargé de l’acte ne fit pas la demande d’exonération prévue par le dispositif fiscal « Monichon », au motif qu’il ne présentait aucun avantage à l’époque des faits, sans toutefois, justifier de ses conclusions. Pour rappel, ce dispositif prévoit sous certaines conditions notamment de gestion durable pendant 30 ans, une exonération de droits à hauteur des ¾ de la valeur des parcelles forestières.
Les donataires contraints de s’affranchir d’une charge fiscale supplémentaire, assignèrent le notaire en responsabilité et indemnisation pour non-respect de son devoir de conseil et d’information. Les requérants déboutés par les juges d’appel, qui écartèrent la responsabilité du notaire en se basant sur l’étude de la fiscalité de l’époque, se pourvurent en cassation. La Haute juridiction rappela que « le notaire est tenu d’informer et d’éclairer les parties, de manière complète et circonstanciée, sur la portée et les effets, notamment quant aux incidences fiscales, de l’acte auquel il prête son concours ».
Les juges de droit cassant l’arrêt d’appel renvoient les parties devant Cour d’appel. Au cas d’espèce, les juges du fond auraient dû rechercher si le notaire avait porté à la connaissance des parties les incidences fiscales du non-recours au dispositif « Monichon ». De surcroît, le notaire a omis d’indiquer aux donataires que ce non-recours entrainerait l’impossibilité pour eux de pouvoir prétendre à un abattement sur l’autre fraction du patrimoine successoral.
Avis de l’AUREP :
Il est de jurisprudence constance que le notaire est tenu d’un devoir de conseil et d’information notamment sur les conséquences fiscales des actes auxquels il prête son concours. L’arrêt d’espèce en est l’illustration, le non-recours à un dispositif fiscal et ses incidences doivent être motivés et justifiés par le notaire par écrit, moyen de preuve irréfragable.
Au demeurant, la demande d’exonération relevant de la responsabilité du notaire chargé de la mutation à titre gratuit, ces obligations ne sauraient être écartées. Ce constat s’avère d’autant plus vrai que le délai de rappel fiscal de 15 ans, long en pratique fait peser une incertitude fiscale supplémentaire.