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Il est de jurisprudence ancienne, que la cession de parts ou actions de société revêt un caractère civil. Toutefois, et dès lors que ladite cession emporte cession de contrôle de la société commerciale, l’opération relève des actes de commerce quand bien même elle ne serait pas réalisée entre commerçants.
Au cas présent (Cass. Com., 30 août 2023, n° 22-10.466), des associés avaient cédé l’entièreté de leurs droits sociaux d’une société commerciale à une autre structure moyennant un prix de vente de 380 000€. La société cessionnaire avait alors versé un acompte à hauteur de 300 000€.
Les parties avaient convenu que le prix, basé sur le dernier arrêté comptable, pourrait faire l’objet d’une revalorisation à la baisse en fonction de la situation comptable intermédiaire de cette société à une date plus proche de la cession. Cet examen comptable intermédiaire faisait ressortir des capitaux propres nettement négatifs. Dès lors, les acquéreurs soumirent aux cédants un projet de prix définitif à hauteur de 1€ et sollicitèrent le remboursement de l’acompte versé.
Saisie de l’affaire, la Cour d’appel de Bordeaux avaient condamné les cédants au remboursement solidaire d’une partie de l’acompte (299 999€) assorti de l’intérêt au taux légal.
Deux des associés cédants s’étaient alors pourvus en cassation au regard de cette condamnation solidaire. La singularité de l’espèce résidait dans le fait que les requérants ici minoritaires, ne détenaient respectivement qu’une seule part. Ils invoquaient aux moyens de leur requête entre autres, le fait que dans le cadre d’un acte civil, la solidarité ne se présumait pas au regard des articles 1309 et 1310 du Code civil et que la garantie conventionnelle consentie n’emportait pas solidarité passive.
En dépit de ces différentes allégations, la Cour de cassation cantonna son raisonnement à la qualification de la cession litigieuse. Constatant le fait qu’elle portait sur l’intégralité des parts, la cession opérant transfert de contrôle, revêtait le caractère d’acte de commerce avec toutes les obligations que cela implique pour les cédants : en l’espèce, l’obligation solidaire de restitution résultant de la clause de prix. La Haute juridiction laisse entendre ici qu’il aurait pu en être différemment si une clause écartant expressément cette solidarité avait été insérée dans l’acte de cession. Enfin, les juges du droit précisent que la cession de contrôle s’apprécie au regard du seul cessionnaire.
Avis de l’AUREP
Bien que la question de l’espèce n’eût pas été clairement et individuellement tranchée par la Haute juridiction, la solution retenue ici est le fruit de jurisprudences anciennes existant en la matière. La cession de contrôle d’une société commerciale est un acte de commerce (Cass. com., 28 nov. 1978, n°77-12.609, Cass. Com., 28 avr. 1987, n° n° 85-17.093). Elle emporte ainsi obligation solidaire passive (présomption simple) des cédants de restitution du prix dans le cadre d’une clause de prix insérée dans l’acte de cession.
Nous attirons l’attention des praticiens ici sur le continuel devoir de conseil afférent à ce type d’acte et plus particulièrement sur l’ingénierie entourant sa rédaction.